Blog Bier-Neuigkeiten La taproom ou le retour aux sources de la bière
La taproom ou le retour aux sources de la bière

La taproom ou le retour aux sources de la bière

Elles font désormais partie intégrante du paysage brassicole, et rares sont aujourd’hui les brasseries à ne pas s’en être dotées : les taprooms sont partout. Si l’on peut les définir simplement comme des “bars de brasseries”, elles sont bien plus que ça. Nous avons poussé la porte de quelques-unes d’entre elles.

 

Qu’est-ce qu’une taproom ?

 

Il fut un temps - que les moins de 900 ans ne peuvent pas connaître - où la bière ne voyageait pas jusqu’à des centaines de kilomètres avant d’être servie et dégustée, faute de moyens de conservation corrects. Elle était plutôt servie directement sur son lieu de production, fraîche de quelques jours à peine. Sont ensuite passés par là les échanges commerciaux puis la Révolution industrielle et son cortège d’innovations. Houblonnée, conservée au froid, voire pasteurisée, la bière était prête pour la mondialisation, et l’une des conséquences a été la séparation des lieux de production et de consommation.


Mais depuis quelques années, le nombre de brasseries à se doter d’un espace de service directement accolé à la salle de brassage, plus connu sous le nom de “taproom”, s’est multiplié. Impossible d’évaluer le nombre de brasseries ayant sauté le pas, mais il s’agit d’une tendance continue, particulièrement depuis la fin des confinements liés au Covid-19. Il est d’ailleurs intéressant de noter que les brasseries n’ont pas attendu d’avoir le droit de vendre leurs bières directement au public sans licence, à emporter mais également pour une consommation sur place, comme le pouvaient déjà les domaines viticoles - droit qui ne leur a été accordé que le 1er juillet 2025.


En offrant à sa clientèle un espace de dégustation directement à la source, bien souvent avec vue sur les cuves de brassage, la taproom nous ramène donc aux premières heures de la bière, des aleswives anglaises vendant leur surplus de brassage domestique sur le pas de leurs portes, aux publican brewers, les ancêtres des pubs modernes. À la différence du brewpub, qui brasse également ses propres produits mais uniquement pour une consommation sur place, la taproom n’écoule qu’une partie de la production de l’entreprise, mais avec l’avantage de réaliser une marge intéressante. Eh oui, pas d’intermédiaires = bière moins chères ! Avec en prime pour nous autres qui le consommons, une fraîcheur inégalable du produit…

 

Indispensable, la taproom ?

 

Capture d’écran du site internet de la brasserie 3Ienchs, qui met la taproom en vedette


Mais le chiffre d’affaires n’est souvent pas l’objectif premier dans la décision d’ouvrir une taproom. “Ça permet aux clients de s’approprier notre marque et notre bière”, explique Thibault Buekenhout, co-fondateur de la brasserie des 3Ienchs à Saint-Maur-des-Fossés (Val-de-Marne). “Nous sommes distribués dans les bars des environs, et même si l’étiquette parle un peu, c’est difficile de transmettre notre état d’esprit aux consommateurs, ce que permet la taproom.” La décision d’en ouvrir une a été prise au moment de déménager la brasserie dans des locaux plus grands, en 2022. “Pour nous c’était impossible d’imaginer déménager sans avoir de taproom, précise Thibault. D’ailleurs c’est presque plus l’envie d’avoir un bar que le manque de place qui s’est fait sentir, en tout cas les deux allaient ensemble.”


En Dordogne, la brasserie BAM a également profité de son déménagement à Périgueux en 2021 pour se doter d’une taproom de 300m2 sur les 1000 que compte le bâtiment. “On avait commencé à servir sur place [dans le lieu précédent] et on s'est rendu compte que c'était pas possible par manque de temps, se remémore Ophélia Camandone, co-fondatrice. Et une fois qu'on a commencé à avoir du personnel, c'est le manque de place qui s'est posé. Donc quand on a déménagé, on a profité d'avoir un local plus grand. Surtout que c'est quelque chose qui n'existait pas sur Périgueux.”


Pour les deux brasseries, l’objectif du rapprochement avec la clientèle a été atteint. “Au début, les gens du coin étaient vraiment étonnés de pouvoir boire un coup et voir les cuves juste derrière, de se rendre compte de la taille de la brasserie…, s’amuse Thibault. Et en fait ils sont contents, dès qu’ils ont des amis dans le coin, ils savent qu’ils peuvent les amener ici. C’est un peu une fierté pour eux, ils se sont approprié le lieu.” Chez BAM, l’espace confortable laisse la place à des événements d’ampleur : concerts, DJ sets, soirées à thème… “Par exemple pour Halloween, on a travaillé avec une asso locale, et on a fait l'Halloween des enfants. On a eu plus de 300 personnes !” Dans une économie plutôt morose, voilà des actus qui font plaisir à entendre !

 

Une ressource pour un secteur en difficulté

 

Pour Thibault, qui s’était d’abord fait la main au service lors de festivals ou d’autres événements, la taproom est désormais indispensable à toute brasserie qui se respecte, surtout celles qui débutent : “S’installer sans taproom, c’est risqué, ou alors il faut avoir une force de frappe commerciale et une production assez conséquente.” Mais dans un contexte économique très compliqué pour le secteur brassicole (le Syndicat National des Brasseries indépendantes alerte depuis 2023 sur les difficultés liées, entre autres, à l’inflation), tout le monde ne partage pas cet avis. “Ouvrir une brasserie et y ajouter une taproom, c’est une grosse gestion, met en garde Ophélia. Partir directement dans cette optique-là, ce n'est pas ce que je ferais si je devais tout reprendre à zéro, ajoute-t-elle. Le marché de la bière n’est plus qu’il était, il est devenu extrêmement concurrentiel, et les clients font beaucoup plus attention à leur portefeuille.”

En Dordogne, la brasserie BAM est désormais une étape touristique aussi importante qu’un domaine viticole

 

À chaque gestionnaire ses tactiques pour minimiser les risques. Trois ans après son ouverture, le bar des 3Ienchs n’est toujours ouvert que deux soirs par semaine, et propose une offre simple : les snacks se limitent à des pots que les clients ouvrent eux-mêmes, le service se fait au comptoir… “C’est un lieu assez “roots” parce qu’on l’a fait avec les moyens du bord au début, et puis petit à petit ça se perfectionne, mais les gens aiment bien ce côté un petit peu rock'n'roll, surtout dans une ville comme Saint-Maur-des-Fossés où on a plutôt des brasseries un peu tradi, un peu bourgeoises”, argumente Thibault. En Dordogne, BAM fait “appel à des collègues avec plaisir” quand sa production maison ne suffit pas à monopoliser les 13 becs de sa tireuse. Et qui dit sud-ouest dit forcément… vin, qui est évidemment proposé aux +1 peu adeptes des bulles maltées.


Les brasseries ont d’ailleurs investi un autre créneau jusqu’à présent très lié au vin : le tourisme. “On a des partenariats où, l'été, les touristes peuvent s'inscrire auprès de l'office de tourisme pour faire des visites suivies de dégustations à la taproom avec planche apéritive”, détaille Ophélia. Chez les 3Ienchs, récipiendaire d’un label “Artisan du tourisme” en 2023 et 2024, les visites ne sont pas encore prises d’assaut, “faute de visibilité”. Gageons que la visite de la taproom donnera envie à certains et certaines d’aller explorer un peu plus loin !



Et en attendant de vous rendre dans la taproom de votre prochaine brasserie préférée, si vous receviez sa bière directement chez vous ? C’est possible avec notre abonnement Sans Pression, qui vous permet de recevoir chaque mois six bières de trois recettes à partager, accompagnées du Galopin, notre fiche pour tout savoir sur le monde brassicole.



Article rédigé par Hélène et les Houblons pour Le Petit Ballon.

 

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